Aller au contenu

DALO / L’insécurité dans le logement occupé / Nouveau critère DALO ?

(A jour au 6 septembre 2016)

Le Conseil d’Etat, dans sa décision du 8 juillet 2016, retient une interprétation élargie des critères d’éligibilité au Dalo.
Il apporte un nouvel éclairage sur les critères de saisine de la commission de médiation Dalo prévus à l’article L 441-2-3 II du Code de la construction et de l’habitation et plus précisément celui relatif au demandeur logé dans des locaux impropres à l’habitation ou présentant un caractère insalubre ou dangereux.

La prise en compte de l’environnement d’insécurité et de son caractère dangereux au regard du logement occupé

Dans l’arrêt du 8 juillet 2016, les juges suprêmes estiment qu’un demandeur ayant déjà un logement qui justifie se trouver, dans l’immeuble où il réside, dans une situation d’insécurité créant un risque grave peut être reconnu prioritaire au titre du droit au logement opposable. Les conditions de vie dans le logement occupé peuvent ainsi caractériser le caractère dangereux du logement actuel.

Les faits

La requérante, déjà locataire d’un logement social, avait saisi la commission de médiation du département de Paris en motivant son recours notamment par l’insécurité de son logement du fait d’actes de délinquance dans son immeuble, dont certains l’avaient visée personnellement.
La commission de médiation rejette sa demande au motif « que la question de l’insécurité du quartier renvoie à une démarche exclue de la compétence de la commission » et que par ailleurs, elle était déjà locataire dans le parc social.
Le Tribunal administratif de Paris saisi en annulation de la décision de la commission rejette son recours et la requérante se pourvoit en cassation.
Le Conseil d’Etat fait droit à sa demande et annule le jugement du tribunal administratif du 7 février 2014 ainsi que la décision de la commission de médiation du 13 décembre 2011.

L’insécurité créant un risque grave, un critère à prendre en compte par les commissions de médiation

Le Conseil d’Etat estime que « le législateur a entendu ouvrir aux personnes que leurs conditions de logement exposent à des risques personnels graves la possibilité de saisir sans délai la commission de médiation afin qu'elle les désigne comme prioritaires et devant être relogées en urgence ; qu'en dehors du cas où les locaux occupés par le demandeur sont, en raison de leurs caractéristiques physiques, impropres à l'habitation, insalubres ou dangereux, ces dispositions [du II de l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation] permettent à la commission de désigner comme prioritaire et devant être relogée en urgence une personne établissant l'existence, dans l'immeuble où elle réside, d'une situation d'insécurité liée à des actes commis de manière habituelle et qui, du fait d'une vulnérabilité particulière ou d'autres éléments liés à sa situation personnelle, créent des risques graves pour elle-même ou pour sa famille ».

Autrement dit, le caractère impropre à l’habitation, insalubre ou dangereux n’est pas seulement défini pour le Conseil d’Etat par les caractéristiques physiques du local occupé par le demandeur. La Haute juridiction considère qu’une situation d’insécurité portant atteinte au demandeur ou à sa famille permet également de faire valoir le droit à un logement opposable et de saisir la commission de médiation sans délai.


Pour le Conseil d’Etat, la non prise en compte par le juge du fond de la situation d’insécurité, dès lors qu’elle est établie, est constitutif d’une erreur de droit

Dès lors, une situation d’insécurité constituée par des actes de délinquance dans l’immeuble où est situé le logement, certains de ces actes ayant visé personnellement le demandeur ou sa famille et créant des risques graves permet de faire valoir le droit à un logement opposable et d’être reconnu comme prioritaire et devant être logé en urgence.

Une telle situation pourrait concerner des demandeurs victimes de violences conjugales, familiales ou autres, et résidant dans le même quartier que le ou les auteurs de ces violences.


Remarque
•    Le Conseil d’Etat confirme par ailleurs dans cette décision la position des juges du fond retenant que le fait d’être déjà locataire d’un logement social ne peut être pris en compte pour exclure un demandeur du dispositif DALO (cf  TA Versailles, n°0904361, 15 avril 2010 cité dans le Guide des bonnes pratiques des commissions de médiation – Février 2014 ou encore TA Marseille, n°0808911, 26 novembre 2009).
•    A relever également que le Conseil d’Etat ne fait pas droit aux conclusions de la requérante tendant à ce que le juge administratif la désigne comme prioritaire et devant être logée en urgence. Il considère en l’espèce que seule une injonction de réexamen de la demande par la commission de médiation peut être prononcée.

Consulter l'arrêt CE, 8 juillet 2016, n°381333

Retour en haut de page