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Les revenus précaires et l'accession à la propriété

ANIL, Habitat actualité, juillet 1998


Depuis le milieu des années 80, l'intérim et les contrats à durée déterminée ont connu un développement rapide : de 1985 à 1997, le nombre de ces emplois a été presque multiplié par 3, passant de 420 000 à 1,18 millions d'unités.
L'intérim et les CDD représentent aujourd'hui environ 6 % de l'ensemble de l'emploi salarié (apprentissage et contrats aidés exceptés).
Toutefois, si l'augmentation de la part des emplois précaires constitue sans aucun doute une tendance de fond, elle n'a pas été continue.
Des périodes de forte expansion coïncidant avec les phases de reprise économique alternent avec des périodes de ralentissement, voire de baisse, dans le cas l'intérim, dans les phases descendantes des cycles. Les entreprises ont majoritairement recours à ces formes d'emploi dans leurs recrutements pour prévenir les situations de sureffectif : ainsi, en 1994, 80 % des embauches (hors intérim) dans les établissements de 50 salariés et plus ont été réalisées sous forme de contrats à durée déterminée ; cette proportion n'était que de 65 % cinq ans auparavant.
Les intérimaires sont surtout des hommes qui occupent des emplois d'ouvriers, dont la moitié ont des postes non qualifiés. Leur profil ne s'est pas modifié au cours des dernières années. On observe en revanche une évolution sensible des emplois en CDD. Certes, cette forme d'emploi concerne toujours en priorité les jeunes (elle représente près de 12 % des emplois des moins de 25 ans), les ouvriers et les employés, mais on a vu se développer au cours des dernières années les recrutements en CDD pour des postes qualifiés. Par ailleurs, sur les postes les moins qualifiés, les contrats conclus dans le cadre des dispositifs d'aide à l'emploi tendent à concurrencer les CDD dans les embauches de jeunes. En conséquence, les salariés sous contrat à durée déterminée sont devenus plus diplômés et plus âgés. L'intérim et les contrats à durée déterminée peuvent constituer une phase transitoire avant l'accès à un emploi plus stable. Toutefois, selon l'enquête emploi de l'INSEE , les intérimaires ou titulaires de CDD ayant décroché dans un délai d'un an un contrat à durée indéterminée sont largement minoritaires : 33 % pour les CDD et 23 % pour les intérimaires (chiffres de 1994-95). Cette proportion tend d'ailleurs à diminuer : elle était respectivement de 43 % et 30 % en 1989-90. Presque aussi nombreux sont ceux qui n'ont alors plus d'emploi, qu'ils soient considérés comme chômeurs ou inactifs (respectivement 27 % et 22 %).

Les autres (37 % des CDD et 47 % des intérimaires) ont toujours un emploi temporaire, mais pas forcément le même ni du même type. Ainsi, 9 % des intérimaires ont au bout d'un an un contrat à durée déterminée. En résumé, le recours à ces formes d'emploi tend à se banaliser dans les entreprises.
Cependant, elles ne représentent encore qu'une part relativement faible dans l'ensemble des salariés et touchent, avant tout, les jeunes. En conclusion, si le développement des emplois précaires et, par voie de conséquence, du nombre de ménages à revenus instables, est incontestable, il semble jusqu'à présent n'avoir eu qu'une incidence minime sur le profil moyen des candidats à l'accession.
Les personnes les plus touchées par cette précarisation des emplois se situent, pour la plupart, à la marge de la population des accédants potentiels, que ce soit en termes d'âge (beaucoup sont jeunes) ou de revenu. Il est donc vraisemblable qu'elles estiment d'elles-mêmes n'être pas en mesure d'accéder à la propriété et sont, par conséquent, très peu nombreuses à solliciter un prêt. De surcroît, la grande majorité des candidats à l'accession sont des couples, la plupart du temps de deux actifs. Dans le cas où seul l'un des deux conjoints occupe un emploi précaire, l'autre ayant un revenu stable, cela ne constitue pas forcément un problème pour le prêteur si le revenu stable est suffisant.
Les établissements de crédit ont-ils intégré cette évolution dans leurs pratiques, et si oui, de quelle manière ? Quel est l'état de leurs réflexions sur ce sujet ? Quels enseignements peut-on tirer des expériences des pays étrangers ? Ces questions sont d'autant plus importantes que l'hypothèse d'une poursuite du développement de ces nouvelles formes d'emploi apparaît à beaucoup vraisemblable, sinon probable. Pour y apporter des éléments de réponse, L'ANIL et le réseau des ADIL ont lancé une étude qui s'appuiera d'une part sur des interviews de responsables d'établissements, d'autre part sur les consultations financières émanant de candidats à l'accession dont une part au moins des revenus peut être considérée comme précaire.

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